Trouver les maux

Publié le 12 février 2025

« Trouver les maux » est une tribune d’Ugo Dessertine, responsable du design à la Direction interministérielle du numérique (DINUM).

C’est une histoire ordinaire. Une histoire qui vous sera probablement familière. Ça commence comme ça : un site en ligne est vieillissant, il a fait son temps. Il est l’heure de lui donner une nouvelle jeunesse, une petite prouesse. Alors, on se lance.

On réunit autour d’une table celles et ceux qui connaissent ou ont à connaître du sujet. Ça fait une grande table, virtuelle. Ensemble, on passe en revue ce que le site était, ce qu’il ne devra plus être, ce qu’il devra être. On fait plusieurs réunions. Un mois plus tard d’un travail intense, on aboutit à un cahier des charges fonctionnel.

On réunit alors autour d’une table, toujours virtuelle mais l’on peut imaginer que ce n’est pas la même, celles et ceux qui auront à créer le nouveau site. Ça fait du beau monde et ça prend encore un mois de plusieurs réunions. On aboutit à un cahier des charges technique.

Un cahier sous chaque bras, il ne nous reste plus qu’à bâtir. On sait ce que le site doit faire, et comment il doit le faire. Les développeurs se mettent à l’œuvre, les autres œuvrent ailleurs. Il se passe six mois. C’est long. Il est temps de se retrouver autour d’une table, bien réelle cette fois, c’est préférable. On contemple ce qui a été œuvré. On boucle les derniers préparatifs. Le temps presse, le nouveau site sort.

Ça se termine comme ça : le nouveau site est en ligne, mais personne n’est content. Il est difficile à trouver, difficile à comprendre, difficile à utiliser, difficile à améliorer. Et pourtant, ce n’est ni le temps ni l’argent qui ont manqué. Mais alors quoi ?

Récapitulons : nous avons croisé les gens qui décident, les gens qui paient, les gens qui savent et les gens qui développent. Et les gens qui utilisent notre site, où sont-ils ? On demande à ceux qui savent, qui nous disent que ceux qui décident ont demandé à ceux qui développent, mais ceux qui paient trouvaient ça trop cher. Ou l’inverse, peut-être.

Pourtant, les utilisateurs avaient quelques choses de précieux à nous apporter. La clé de voute de l’ouvrage. Les maux. Pas n’importe quels maux. Les maux qu’ils rencontrent quand ils doivent connaître le service. Les maux qu’ils rencontrent quand ils doivent comprendre le service. Les maux qu’ils rencontrent quand ils doivent utiliser le service. Ces maux, c’est avec leurs mots qu’ils les expriment. Et c’est en allant leur parler, c’est en les écoutant qu’on les obtient. Les maux ne sont pas rares, ils ne sont pas difficiles à trouver. Encore faut-il s’adresser à celles et ceux qui les rencontrent : nos utilisateurs.

Cette histoire aussi a fait son temps. À notre tour de lui redonner une jeunesse, une belle promesse : plus une minute, plus un centime pour un service s’il n’est pas tout à ses utilisateurs, sincèrement, radicalement. Dès maintenant, évidemment. Nos utilisateurs sont impatients.